Le morceau d’introduction du 4ème album de Travis Scott, Utopia, se termine avec un sample des paroles de George Clinton qui inaugurent Maggot Brain. Empli d’un cynisme acquis par l’expérience, le leader de Funkadelic égrenait là ce qui était pour lui sa méthode de survie face aux vices et faiblesses d’une humanité faisant figure de véritable tyran pour son habitat: s’élever ou se noyer. 52 ans plus tard, ces mots quasi prophétiques sont gonflés d’un sens plus palpable que jamais. Comment se fait-il alors qu’ils aient été choisis pour donner le ton d’un album aussi médiocre qu’Utopia? Est-ce là une énième preuve de l’hubris générationnel hérité par Travis Scott de son mentor maudit? Sans doute ; c’est aussi, contre son gré, une excellente blague qui laisse à l’auditeur le soin de déterminer, à la fin du disque, si Travis Scott est parvenu à purger les vers qui infestent son cerveau pour s’élever, ou s’il a fini par couler dans sa merde. Rare moment de lucidité où l’artiste enjoint son auditeur à faire preuve d’esprit critique!
A titre personnel, je prends les mots fort à coeur, et suis fermement convaincu qu’il n’est pour ainsi dire jamais anodin si tel mot est utilisé dans un discours. Bien que l’être humain ne sache que très rarement manier les mots en correct accord avec leur sens, le simple fait qu’il en emploie certains en les dévoyant ou sans même soupçonner leur implication est édifiant. Il arrive aussi bien souvent qu’à travers les siècles, ou même au bout de quelques années seulement, un mot soit galvaudé, dénaturé un peu ou beaucoup. L’entrée du terme d’utopie dans le langage commun suite à la parution de chef d’oeuvre de l’anglais Thomas More en 1516 n’y a pas échappé. Aujourd’hui l’utopie désigne le fantasme, l’idéal d’une société meilleure, inatteignable. Sur ce dernier point, en vérité, à l’heure actuelle, le mieux est bel et bien inatteignable. Mais il est fort douteux que Travis Scott ait compris l’ouvrage de référence, plus probable qu’il s’accroche à sa propre conception de l’idée d’utopie. Et quelle est-elle? L’Utopia scottienne n’est en fait une utopie ne concernant personne d’autre que Travis Scott lui-même, une dans laquelle il est libre de laisser libre cours à sa folie des grandeurs aussi impressionnante que superficielle, où il est complètement isolé du monde extérieur, et même en déni total de celui-ci à certains égards, hormis lorsqu’il s’agit de faire pénétrer à l’intérieur de son microcosme une nouvelle tête susceptible de l’embellir. Car que l’on ne s’y trompe pas, Travis Scott n’est pas le genre d’artiste à pouvoir exécuter un album concept comme il pense l’être, et le cheminement de cet album, qui est entendu comme un chemin de croix vers l’utopie, échoue évidemment pour mettre en exergue la complaisance de son auteur. Une complaisance dans le lucre, les vices et la luxure, que Travis Scott tente de travestir comme tant d’afflictions jalonnant le parcours ô combien difficile des personnages publics de son envergure. Et bien que dans les faits, ce soient effectivement des obstacles sur le chemin de sa conception de l’utopie, qui semble plutôt une paix intérieure et une réussite qu’autre chose, on se rend bien compte qu’il n’a pas pour ambition de les éviter plus que cela dans l’état actuel des choses.
A la fin du sixième morceau d’Utopia, se trouve logé un outro skit durant lequel Drake et une femme ont une brève conversation. Cette dernière a dû s’entendre dire qu’on l’amenait vers Utopia, sans trop de précision, et tombe maintenant des nues sur le seuil de la porte de la chambre d’hôtel d’Aubrey. Promesse vole en éclat? Le canadien réplique que la chambre lui semble parfaite. Inutile ici de chercher le moindre sens caché ; probablement que dans les cerveaux torses de Travis Scott et du parrain de Toronto, un tel dialogue était un véritable mindblow destiné à faire comprendre aux auditeurs ce que signifiait Utopia dans le contexte du disque, mais personne ne le perçoit ainsi. Non, ce que cela nous indique, et très limpidement, c’est le peu de cas que Travis fait du soit-disant concept de l’album. Vous vouliez un album qui vous emmène loin, vers une destination idyllique, fantasmagorique, idéale? Boh ma foi cette bacchanale matérialiste, complaisante et creuse me semble parfaite. C’est simplement dommage qu’ils aient placé ce skit ô combien fondamental pour l’album si loin dans la tracklist. Mais enfin, lorsqu’on y arrive, techniquement, on a déjà tout compris, c’est juste histoire qu’il ne subsiste aucune ambiguïté n’est-ce pas.
Et oui, à la stupeur de tout le monde, passées à la trappe les valeurs de régénération de l’humanité par l’assainissement des moeurs sociales et politiques, au diable la primauté de la communauté face aux gangrènes purulentes de l’individualisme. De manière assez paradoxale donc, l’utopie de Travis Scott est bien réelle. C’est simplement une distorsion arrangeante d’une idée noble, qui serve de justificatif factice à bien des choses.
En vérité nous devrions être accoutumés à ce que des musiciens mobilisent de grands concepts pour simplement donner une majesté et une profondeur à leur oeuvre, poudre aux yeux qui s’évanouit aussitôt ou presque que l’album est lancé. Mais que voulez-vous, nous restons humains et à ce titre avons-nous bien du mal à ne pas avoir le réflexe de l’espoir. Le cas de figure présent est cependant particulier: nous avons assisté sur les réseaux sociaux à une levée de boucliers quasiment unanime au sujet d’un point précis plus que d’autres, de l’album, à savoir la vacuité textuelle aberrante de son interprète principal. D’où nous vient cette réaction? Sachant que parmi sa génération, et ce depuis le début de sa carrière, Travis Scott n’a jamais, au grand jamais, fait figure de grand écrivain. Conjurer des émotions bien réelles et vivaces, il y arrivait, et ce dès Owl Pharaoh, mais c’était à attribuer à sa manipulation de l’autotune et son sens aiguisé des artifices théâtraux et des grands gestes, capacité qu’il a hérité de son mentor Kanye West. Et malgré cela, dès ses débuts, il était déjà critiqué pour son incapacité à raconter quoi que ce soit d’un minimum captivant. En vérité tout bon fan de rap vous le dira, ce n’est pas tant ce que les artistes ont à dire qui importe, mais bien comment ils le disent. Au-delà de ça, là aussi à la manière d’un Kanye West dans la dernière décennie de sa carrière, Travis a rapidement compris où résidait son talent et a cessé de faire des efforts sur ses propres performances: la menée de l’orchestre, le design de la scène, le paramétrage du son et des lumières. Mais n’est pas Kanye West qui veut, et l’on sait tous que jamais Travis Scott ne parviendra à effleurer les hauteurs que son mentor a si souvent atteintes.
Cependant, face à la déliquescence dudit mentor, force est d’admettre qu’il a fallu se satisfaire d’un ersatz, qui jusqu’à Astroworld semblait faire plus ou moins l’affaire. Mais qu’a-t-il bien pu se passer entre 2018 et 2023? On connaît tous déjà la réponse, à savoir la tragédie du 5 novembre 2021 qui a laissé 10 cadavres dans son sillage, dans l’un des plus grands fiascos de l’industrie du spectacle vivant de notre ère. La gestion de la crise de la part de toutes les parties impliquées fut détestable, les réactions de Travis Scott y compris. Mais ici n’est guère le lieu pour refaire un procès, ni de discuter les responsabilités. Toujours est-il que ce drame eut pour effet de repousser indéfiniment la sortie de son prochain album, Utopia. S’il faut ajouter un autre évènement survenu dans la vie de l’artiste dans cet interval, on peut mentionner le fait qu’il ait eu un second enfant avec Kylie Jenner, la petite Stormi (elle fait une brève apparition sur Lost Forever) étant née quelques mois seulement avant la sortie d’Astroworld. Ces deux évènements marqueraient à coup sûr la vie de n’importe qui, et qui sait, d’aventure, peut-être le poids de la maturité acquise en conséquence se ressentirait-elle dans certains aspects de ses activités… Que nenni. Ou presque. On aurait pu s’attendre à ce qu’Utopia aborde par exemple des thèmes comme la culpabilité, le deuil, la honte, ou que notre homme arbore un sens des responsabilités accrus, un recul sur sa vie, mais à l’évidence, nous avons affaire à peu ou prou le même esprit qu’il y a cinq ans, pour le meilleur comme pour le pire. Au cours des 73 minutes que dure l’album, seule une phase touche le sujet de la tragédie d’Astrofest, sur un des points d’orgue du disque, My Eyes: « If only they knew, what Scotty would do, to jump into the crowd and go save him a child ». Ai-je ici besoin de mettre en exergue à quel point il est détestable que les seuls mots consacrés aux familles des 10 personnes décédées ramènent le chagrin à celui qui a le moins perdu? Peut-être est-ce aussi à cause de ce manque de considération, de remords, d’humanité en vérité, que la réaction face à l’album n’ait été aussi féroce chez certaines personnes. Et comment reprocher cela? S’il y avait des attentes réalistes à avoir, cela en faisait partie! Parfois on croit rêver, alors qu’en réalité c’est un cauchemar. Difficile de toujours penser à se prémunir du pire de l’être humain. L’utopie, pour ces gens-là, c’est aussi l’évasion des responsabilités, c’est aussi le privilège de pouvoir vivre au-dessus du malheur, c’est pouvoir passer à autre chose rapidement. C’est donc pourquoi l’on se retrouve à devoir tolérer les élucubrations lubriques usuelles de l’artiste, l’egotrip infini, entrecoupé de quelques moments de vulnérabilité que l’on a plus que jamais du mal à prendre au sérieux. Ce qui fait un peu tampon, c’est sa progression en termes de cadence et de flows, on sent Travis un peu plus en phase avec le fait qu’il doive rapper. Cela donne des prestations au micro un peu plus convaincantes que d’habitude, ce qui est vraiment salutaire. Mais toujours et encore on a l’impression d’avoir affaire à un robot faisant de son mieux pour reproduire la nature humaine.
En premier lieu ce qui frappe à l’écoute d’Utopia, c’est son côté insulaire, isolé de toutes les tendances du monde du rap de 2023. Nulle trace de drill, de jersey club ou de toute autre dernière mutation en date du genre. Voilà au moins une vraie cohérence avec l’ouvrage de More. Cependant, l’Utopia de Travis Scott n’est pas Nulle-Part, elle est éparpillée dans l’espace et le temps, tel un archipel. En cause, la provenance des morceaux composant l’album. Au moins six (!) morceaux proviennent de sessions d’album d’autrui (Metro Boomin, Kanye West, Beyoncé), qui remontent parfois jusqu’à près de 10 ans en arrière. En effet, l’instrumentale de Modern Jam n’est autre que l’instrumentale d’origine d’I am a God, qu figurait sur Yeezus, l’album de référence pour Utopia. On peut également mentionner les diverses interventions de Justin Vernon comme un autre indice du système de référence kanyesque de Travis. Son ombre plane toujours dans les méandres de l’esprit de Travis Scott, encore traumatisé qu’il est par le côté précurseur du dernier chef d’oeuvre de son mentor. Par ailleurs, Looove avec Kid Cudi avait quant à lui été entendu pour la première fois lors de la release party de Days Before Rodeo en 2014. Enfin, la rythmique de Circus Maximus est peu ou prou la même que Black Skinhead. On comprend donc ce fameux côté insulaire, dégagé du zeitgeist. Fidèle à ce qu’il avait indiqué dans l’une de ses interviews, on retrouve également quelques samples de rock progressif (Gentle Giant sur Hyaena, New England sur Sirens). Et l’on se retrouve une seconde fois en présence d’un album grandiose, jouant son va-tout sur la surprise et l’extraordinaire, sur le spectacle.
Ce que ce recyclage d’idées nous indique, c’est le cruel manque d’inspiration de Travis Scott. Là où il était parvenu à maquiller par force effets spéciaux, dépenses colossales de production, et quelques coups de théâtre bien sentis, Utopia n’est en vérité qu’un patchwork terne fait des chutes peu ouvragées d’un tisserand décadent honni pour ses frasques par la société, mais qui conserve toute sa superbe dans l’esprit de son disciple. Néanmoins, fatalement, lorsque l’on va piocher dans les pires travaux de n’importe quel artisan, pour à peine les retoucher avant de les commercialiser, il ne faut pas être étonné que les clients se sentent doublement floués. En somme, Utopia est une tentative non pas bien sûr de tuer le père, mais bien au contraire de le ressusciter: artistiquement, médiatiquement, humainement peut-être même. Et cela passe par un achèvement de la désincarnation du fils, qui de toute manière n’était jamais vraiment parvenu à s’incarner complètement, toujours trop suspendu aux arcanes de la mythologie paternelle pour se découvrir lui-même. Mais Utopia est la meilleure preuve possible du gouffre séparant les deux individus: là où Kanye avait puisé dans les aléas de sa vie pour créer certains de ses chefs d’oeuvres, comme la perdition qui a inspiré 808s & Heartbreaks, Travis est incapable de traduire son vécu en art, ce qui, en soi, est complètement antinomique au concept même d’artiste. C’en est tout bonnement aberrant. Sa seule réaction en est une de défense: se réfugier plus profondément encore dans l’ombre du père.
Le terme de blockbuster a déjà été utilisé par bien des médias pour décrire l’album, et à mon grand dam, je ne puis que l’employer à mon tour, puisque c’est bien cela dont il s’agit. Pyrotechnie, onirisme, nihilisme, décadence, nombreux sont les mots qui nous viennent pour décrire ce grand cirque qui s’offre à nous, au cours duquel se succèdent une grande troupe d’artistes, vocalistes et producteurs, qui s’efforcent de pourvoir aux désirs les plus immédiats des spectateurs. Et nous autres spectateurs d’être ébahis devant l’opulence outrancière du divertissement, de s’émerveiller des prouesses sonores de l’armada d’ingénieurs qui ont oeuvré en coulisses pour mettre au point la bande son de cette performance. Les fans assidus du genre se languissaient d’une grosse sortie, ils avaient besoin d’un Fast & Furious ou un Mission Impossible musical, et bien qu’à cela ne tienne, le voici enfin arrivé. Ayant survécu suffisamment longtemps pour passer du héros au vilain, notre protagoniste tente ici de revenir à sa gloire d’antan. Il avait devant lui un bien beau boulevard: le genre tentaculaire qu’est le rap jouissait justement depuis le début de l’année d’un retrait des projecteurs et des charts, pour mieux se régénérer et laisser croître en toute quiétude ses derniers embryons. Car s’il faut à nouveau le dire, que ce soit fait: ce phénomène est une chose saine. Ce boulevard, il a pu s’y engouffrer sans problème et réaliser des chiffres énormes. Le contrepoids, c’est maintenant l’opprobre critique. Là où les artifices d’Astroworld, la hauteur de ses montagnes russes, avaient suffi à convaincre, Utopia ne parvient pas à répliquer ce succès critique.
Pourtant force est d’admettre qu’en dépit du trou noir logé à l’intérieur de la coquille, cette coquille est plutôt attrayante, elle chatoie admirablement et le kaléidoscope qu’elle renvoie suffit – un temps du moins – à oublier l’abysse en trompe l’oeil. Et sur cette coquille se meuvent bon nombre de figures connues, qui si elles ne livrent pas toutes des performances faisant date dans leurs carrière, font somme toute un bon travail pour faire oublier la médiocrité du créateur. Comment dédaigner les multiples apparences célestes de Justin Vernon (où est ce nouvel album de Bon Iver? on en a besoin hier), comment rester de marbre à l’écoute des élucubrations bacchanales de Future, comment ne pas se laisser emporter par l’ascension de la voix de SZA, comment donc nier l’entrain de Teezo Touchdown? L’apparition fugace de Sampha, émergeant des limbes du passé, sur My Eyes, n’est-elle pas aussi belle que frustrante? Et que dire du travail de production? Malgré les redites de Yeezus (Modern Jam, Circus Maximus et Sirens font quand même figure de bons morceaux à mon sens, puisqu’il existe pire référence que cet album), malgré les quelques fillers tels que God’s Country, on y trouve facilement son compte. L’introduction propulse littéralement l’auditeur dans l’album. Le feutre nocturne de I Know? force Travis à puiser dans des ressources qu’il ne mobilisait plus depuis Rodeo, pour une ode à la débauche autodestructrice. Si l’on fait abstraction de la récitation inutile et convenue de Dave Chappelle, Parasail est un nuage contemplatif, au-dessus du tumulte, où là aussi Travis se sent obligé de sortir ses meilleures harmonies. Difficile de circonscrire qui des multiples producteurs sur chaque morceau fait quoi bien évidemment, et impossible de réprimer l’idée que vu l’équipe recrutée, cela aurait pu être mieux, plus aventureux, plus percutant.
Il se peut fort bien que l’album vieillisse moins bien qu’Astroworld, qu’il marque d’une pierre blanche la fatigue du public pour un artiste qui aura beau gesticuler furieusement, se munir des peintures les plus onéreuses et des assistants les plus talentueux, n’a en vérité aucune perspective d’évolution ni humaine, ni artistique, jusqu’à nouvel ordre.
Utopia met l’auditeur face à un dilemme moral et éthique. Pour toutes les cohortes de fans qui vont adorer la magnitude et la grandiloquence de l’album, on va avoir une toute autre population qui va réprouver le matérialisme ridicule de l’oeuvre et de son créateur, ainsi que le néant au sein de la nébuleuse. Mais aucun de ces deux groupes ne va accepter que puissent cohabiter les deux sentiments. Or c’est bien possible, doit-on rappeler l’existence de « plaisirs coupables »? Cette notion reste l’apanage des individus qui ressentent une telle pression de leurs pairs qu’ils finissent par développer une culpabilité à apprécier certaines choses. Puisse ce cas n’être pas le vôtre. Il est tout à fait possible d’apprécier Utopia non en se sentant coupable, mais en méprisant son auteur. Le hasard du calendrier a fait qu’Utopia sorte de concert avec Barbie et Oppenheimer. En voyant Barbie, j’ai ressenti un malaise ainsi qu’une haine de ce que le film représentait sous ses atours féministes et son injonction à l’empowerment. En voyant Oppenheimer, le brasier de ma haine pour les Etats-Unis, le militarisme et le monde de manière générale s’est vu encore amplifié. Pourtant j’ai passé malgré cela des bons moments dans les deux cas. Je passe également un bon moment en écoutant Utopia. Ceci dit, heureusement qu’un stream coûte moins cher qu’une place de cinéma.
Un cynisme inébranlable chez moi me fait dire que peut-être, en cet an de disgrâce 2023, Utopia est le divertissement grand public fade mais impressionnant, vide mais efficace, que l’on mérite. Qu’après tout, Thomas More serait peut-être choqué mais pas étonné que les humains du XXIè siècle tentent de se réconforter en se recroquevillant toujours plus dans leur individualisme, et délaissent plus volontiers leur vie intérieur. Son Utopie à lui visait tout justement le vice, l’immobilisme, la décadence et la corruption des institutions politiques de son temps, qui étaient censées être les garantes de la morale, de la vie communautaire, de la vertu et de la dignité. Et lorsque vint Henri VIII, More reprit espoir, discernant en lui un humanisme qui allait sauver le royaume d’Angleterre de ses maux. Il était loin de savoir que ce roi, malgré ses beaux atours et son discours charmeur, allait être celui qui allait le faire décapiter. Difficile d’échapper à son environnement. C’est justement pour ça que dans l’état actuel des choses, l’utopie n’est rien de plus qu’un mirage.
Article écrit par Hugo.
(Crédit visuel bannière : Collage réalisé à partir de photographies de Amy Harris / Graphisme : @arthurphl)